Trônant sur Bennelong Point, le chef d’oeuvre de Jørn Utzon éblouit. Construit sur ce lieu rempli d’histoire, là où se trouvait la hutte de Bennelong, l’aborigène capturé par les britanniques pour devenir leur interlocuteur, l’Opéra de Sydney à des allures de voilier voguant sur la baie.
Si certains le comparent aussi à une tortue, son toit formant presque une carapace, l’Opéra semble narguer ce pont si impressionnant qui lui fait face, le Sydney Harbour Bridge. De 40 ans son ainé, le géant rivalise difficilement avec la modernité et les traits futuristes de ce qui est devenu en peu de temps, le symbole même de la ville.
L’Opéra qui accueille aujourd’hui près de 8 millions de visiteurs chaque année, et produit plus de 2400 représentations par an, est le lieu incontournable de la culture et des arts du spectacle. Avec ses 6 auditoriums ou théâtres, et son parvis, il peut accueillir près de très nombreuses manifestations chaque semaine.
Un joyau préservé et admiré par les Sydneysiders, mais qui aurait pu ne pas exister…
Une histoire pleine de rebondissements
Tout débute en 1940 lorsque Eugène Goossens, directeur du Conservatoire de musique de l’État de Nouvelle-Galles du Sud fait campagne pour obtenir un lieu dédié aux représentations théâtrales et musicales. Le premier ministre de l’époque entend son appel, et lance en 1955, un concours d’architecture qui reçoit 233 projets issus de 32 pays. La proposition de Jørn Utzon, l’architecte danois, est considérée comme trop futuriste. Elle est vite écartée. Pourtant le projet sera sauvé in extremis, remis sur la table par l’architecte finno-américain Eero Saarinen. Les travaux débutent finalement en 1959 alors que personne ne sait vraiment comment construire cet édifice au courbes si particulières. Le chantier doit durer 3 ans et le coût est estimé à 7 millions de dollars. Mais les retards s’accumulent…
Les coquilles incurvées du toit sont les plus difficiles à réaliser. Seize schémas sont ainsi conçus, développés, essayés puis rejetés. Pour Utzon qui « aime être au bord du possible », il semblerait qu’après 4 ans et 350 000 heures de travail, la construction de ce toit reste un problème insoluble. Alors l’architecte le pense autrement. On ne construira pas de coques, mais une série de sections sphériques reliées entre elles, construites en amont et assemblées sur place. Les travaux du toit peuvent enfin commencer.
Au point culminant de la construction, c’est près de 1600 ouvriers qui travaillent sur le site. Mais dès 1965, le coût du projet étant trop important, le gouvernement commence à exercer une certaine pression sur l’architecte. Celui-ci est alors contraint de démissionner dès 1966. Il repart ainsi au Danemark emportant avec lui tous les plans de l’intérieur de l’Opéra. Trois nouveaux architectes sont nommés pour terminer les travaux qui ne s’inscriront hélas pas dans la continuité de ce qu’avait entrepris Utzon. certaines salles ayant une influence très années 70…
Lorsque la Reine Elisabeth II inaugure le site le 20 octobre 1973, Utzon n’est pas présent, il ne retournera d’ailleurs jamais voir son chef d’oeuvre achevé.
Les travaux auront finalement duré 14 ans pour un coût de 102 millions de dollars, on est loin des 7 millions de départ !
Mais le jeu en valait la chandelle, l’Opéra est magnifique.
Grâce aux verres inclinés à 45 degrés, l’on peut admirer la vue sur la baie depuis l’intérieur du site.
Le toit, composé de plus d’un million de tuiles blanches en céramique, à la finition éraillée et mate, est éblouissant.
A l’intérieur se trouve une particularité qui pourrait sembler de mauvais goût… On retrouve notamment, une salle à la moquette violette.
Un souvenir déplaisant pour Luciano Pavarotti… En effet, en Italie, le violet porte malheur aux artistes, tout comme le vert en France. On raconte donc que l’homme contrarié, aurait demandé à ce que l’on change la moquette. La réception en son honneur sera finalement déplacée dans une autre salle, vraisemblablement à la moquette rouge !
Le comble de l’Opéra le plus célèbre du monde…
Mais si l’Opéra est célèbre dans le monde entier, il possède tout de même un talon d’Achille des plus embarrassants. En effet, si l’on retrouve ici, le plus grand orgue à traction mécanique au monde, il faudrait pouvoir apprécier sa musique comme il se doit, et c’est là que le bât blesse… Il se murmure en effet que l’Opéra souffrirait de problèmes acoustiques. Un cauchemar pour les artistes mais aussi une gêne pour les spectateurs, qui lorsqu’ils sont assis au fond de la salle, doivent parfois tendre l’oreille pour profiter pleinement de la musique. On raconte même qu’un ancien chef de l’orchestre symphonique de Sydney aurait menacé plusieurs fois de démissionner…
La gloire d’Utzon
Pour en revenir à Utzon, malgré ses déboires avec le gouvernement australien, l’architecte acceptera après plusieurs refus, de reprendre contact avec l’Opéra dans un soucis de conservation et de développement. Son fils, architecte lui aussi, supervisera d’ailleurs les travaux de rénovation d’une salle dédiée tout spécialement à Jørn Utzon, la « Utzon Room ».
Même s’il est triste de penser que l’artiste n’aura jamais pu apprécier de ses propres yeux, son chef d’oeuvre achevé, Jørn Utzon aura tout de même eu l’honneur de voir, de son vivant, son Opéra consacré au Patrimoine Mondial de l’UNESCO… Une belle récompense…
Frankie / 16 décembre 2012
Je veux une tuile !!!